François Hollande : « Moi Président, grâce à la finance ! »

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 François Hollande : « Moi Président, grâce à la finance ! »

Illustration : CommonsCDI (CC BY 2.0)

 

La Newsletter (LN) : Bonjour Monsieur le Président, vous pensez gagner votre deuxième présidentielle le 7 mai prochain ?

François Hollande (FH) : Bien sûr que oui, grâce à la finance !

LN : Grâce à la finance ? Celle qui était votre seule ennemie : « la finance sans visage », lors de votre fameux discours du Bourget en 2012 ?

FH : Et oui, regardez ce qui s’est passé depuis. Je – enfin, la France – me finance à presque rien. A 0,03 % début septembre, ce qui est mon minimum, à 0,08% aujourd’hui. Si la finance m’en voulait, elle ne m’aiderait pas tant.

LN : Et comment expliquez-vous ce revirement ?

FH : Très simple : elle a peur des changements brutaux. Regardez Trump. Il a beau annoncer qu’il va baisser les impôts, les très riches ne le suivent pas. Il effraie la bourse. C’est seulement parce que Janet Yellen, la patronne de la Banque centrale américaine, promet qu’elle montera très peu ses taux dans les mois qui viennent que la bourse s’apaise. Et pourtant, Trump répète qu’il veut la virer. Il n’y comprend rien, à la finance !

LN : Et pour la France, c’est pareil ?

FH : Au fond, oui. Avec ces chocs annoncés par ceux qui veulent quitter la zone euro, à l’extrême gauche ou à l’extrême droite, plus ceux qui veulent à droite réduire de 100 milliards la dépense publique, avec moins de fonctionnaires, les marchés prennent peur. Ils voient une France en révolte. Ils ont bien compris que les manifs contre la loi El Khomri étaient un message des syndicats pour le prochain quinquennat.

LN : Je vois l’idée : les marchés financiers seront calmes s’ils pensent que vous allez gagner. Mais comment allez-vous faire ?

FH : Très simple : trois coups de curiaces.

LN : Comme à Rome, mais trois fois ?

FH : Oui : il faut arriver deuxième. Avec Marine, le deuxième est premier ! D’abord, à droite, je suppose que Sarkozy gagnera sa Primaire. Alors Juppé devra le suivre, mais sans enthousiasme, comme tous les autres candidats de droite d’ailleurs. Je ne crois pas que Juppé se présentera en indépendant s’il n’a pas réussi dans son parti. La droite va s’auto-diviser : première curiace.

LN : Puis on va au PS.

FN : Oui, pour la deuxième curiace. J’ai des opposants dans la Primaire qui, contre Sarko qu’il faut battre (n’oubliez pas, le deuxième sera le premier »), seront des faire-valoir. Donc je passe. Et Montebourg ?

LN : J’allais…

FH : Très simple toujours : soit il se présente à la Primaire, il perd et doit me soutenir, soit il veut être seul et il aura beaucoup de difficultés à trouver les signatures. Faites-moi confiance.

LN : Et Bayrou ?

FH : C’est la troisième curiace. S’il se présente contre moi, je sors ma carte secrète…

LN : Qui ?

FH : Macron, bien sûr, l’anti-Bayrou. J’ai « curiacé » la droite, puis le PS, reste le centre.

LN : Mais Macron ne s’entend pas avec vous…

FH : Qu’est-ce que vous en savez ? Et l’essentiel est ailleurs : ils se partagent le même électorat du centre. C’est contre moi en apparence, mais c’est surtout contre eux. Eux aussi vont s’auto-diviser.

LN : Et pendant ce temps-là, les marchés financiers ne vont rien faire ?

FH : Rien, sauf si Trump gagne. Alors, tout sera à revoir, pour tous d’ailleurs. Mais vous avez remarqué que Janet Yellen aux Etats-Unis, Kuroda au Japon (le patron de leur banque centrale) et Draghi, que je ne vous présente plus, rament dans la même direction : calmer les marchés financiers et faire en sorte que les taux longs soient les plus bas possibles. Alors, la bourse tiendra et je m’endetterai à presque rien. Eux trois vont tout faire pour que je continue ma politique. Pas pour mes beaux yeux, mais parce que c’est ce qu’il y a de mieux pour eux. Donc, pas de vague. N’oubliez pas que j’aurai besoin de 200 milliards l’an prochain et qu’il me faut un bon taux d’intérêt !

LN : Ce sera serré, en plus le chômage monte et vous supposez que Juppé perdra…

FH : Pour le chômage, c’est la faute aux attentats ! Pour Juppé qui veut faire des économies de fonctionnaires, les marchés vont se rappeler les grèves de 1995. C’était sa faute. Sans un duel entre moi et Marine, les marchés prendront peur devant tous ces chocs annoncés.

LN : D’accord, mais vous n’allez plus pouvoir dire que la finance est votre « seule ennemie ».

FH : Non, j’ai un autre slogan.

LN : Dites-moi !

FH : Facile. A « Je n’ai qu’une ennemie, la finance sans visage », je réponds : « Je n’ai qu’une ennemie, la politique sans virage ».

LN : Il faudra bien l’expliquer…