Hollande : un politicien du centre ou du barycentre ?

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Où donc va François Hollande ? Vers quelle politique, avec quel Premier ministre, quels alliés, quel programme, quelle croissance ? Bien malin qui pourrait répondre, tant l’homme est secret – on l’a vu. Pour autant, le Président peut se tromper ou faire des erreurs, comme tout le monde, mais il ne va pas au hasard.

 Hollande : un politicien du centre ou du barycentre ?

C’est un Schröder français, avec cette différence qu’il ne cherche pas la rupture, même s’il la promet, ni le centre, ce milieu équipondéré près de Bayrou-Borloo, mais le barycentre, le point où se conjuguent les forces – pour durer. Et ce barycentre, il entend le faire évoluer en fonction de ce qu’il annonce de sa doctrine social-démocrate. Mener une politique du barycentre, c’est mesurer l’ensemble des forces en présence, les faire bouger autant que possible en fonction de ce qu’il souhaite – pour s’y adapter.

Cette démarche est très compliquée en France pour deux raisons :

  • la crise que nous vivons ne se résout pas par ces « solutions keynésiennes », en réalité socialistes : relances par la consommation, « emplois d’avenir » et autres soutiens financés par la dette publique. D’où cette conversion à l’économie de l’offre,
  • la crise se déroule en pleine zone euro, une zone dont la France n’a jamais tiré les avantages et qui se retourne contre elle, avec une obligation plus forte de réduire son déficit budgétaire et moins d’échappatoires. Elle est la dernière.

Comment faire ?

D’abord continuer la triple logique Mitterrand : étouffer ses alliés, diviser ses amis, opposer ses opposants. 

  • se rapprocher de ses alliés pour les étouffer, la formule a commencé avec les communistes et on voit à quel point elle marche. Aujourd’hui, il faut les aider à former un groupe à l’assemblée et à garder des villes. Ceci implique une baisse régulière de leur poids dans le calcul du barycentre, au « bénéfice » des « verts »,
  • « user » donc les verts, même s’ils sont durables, pour les diviser. Il s’agit de leur laisser des avances visibles (Notre Dame des Landes) mais qui se payent cher dans l’opinion (avec les casseurs de Nantes) tandis que la transition énergétique est décidément coûteuse, que « l’économie de l’offre » c’est la compétitivité et que les chiffres du logement ne sont pas bons, preuve que les choix de la Ministre devront être revus,
  • opposer entre eux les opposants, ils le font eux-mêmes.

Ensuite il s’agit de gagner du temps avec les partenaires sociaux sans jamais mettre en scène la logique d’ensemble qui est poursuivie. Ainsi réduire les charges fiscales dans le privé c’est augmenter les marges – c’est avoué, mais réduire les charges fiscales c’est aussi accroître le déficit public, donc s’engager à réduire la dépense publique – le lien n’est pas fait. Ensuite et plus secrète encore est la dynamique nécessaire au succès du plan : comme la réduction de la dépense publique réduit la croissance, il faut que la croissance privée, « native », soit plus forte encore. Donc le profit doit monter davantage. C’est secret.

La stratégie de François Hollande, dans l’état où est l’économie française et dans le contexte européen, suppose une modération des salaires pour doper les profits, avec une désindexation des salaires et des pensions publics pendant deux ans au moins.

Cette politique du barycentre a du mal à se mettre en place, parce qu’elle n’est pas dite. Ceci implique d’attendre que la reprise se muscle ailleurs, que Bruxelles patiente encore et que la BCE accommode. L’inconnue majeure porte sur la façon dont « l’accord » dans le privé pourra faire évoluer les positions dans le public, faire partir la machine et déplacer le barycentre.

La botte secrète de François est que si le barycentre ne bouge pas assez de l’intérieur vers les réformes, les batailles au sein de la droite et entre les extrêmes lui donnent une avance relative. Alors il pourra se représenter. Mais nul ne dit si la France sera, alors, présentable.