La rentrée des casses

- Ecrit par

Où allons-nous, tous ? Notre organisation, qui tient depuis la deuxième guerre mondiale, va-t-elle s’effondrer, au bénéfice de la Chine, mais par la faute des Etats-Unis ?! Nous vivons depuis 1945 dans un monde où les Etats-Unis sont hégémoniques. On peut ne pas aimer, mais on sait qui fait la police des airs et des mers, qui écrit les règles et opère la surveillance de tous, qui a assuré le progrès assez calme du monde – et qui a le dollar. Allons-nous regretter bientôt l’affaiblissement de l’Empire américain, donc sa fin proche, du fait même de son centre ? Rome va-t-il réduire son Empire, parce qu’il lui coûterait trop à entretenir ? Du jamais vu dans l’histoire.

 La rentrée des casses

De fait, Trump n’a pas son pareil pour fissurer les relations internationales, économiques et sociales, surtout à partir de son propre pays. Pire, quand il entend réparer les dégâts, le résultat est plus négatif encore. Charlottesville en est l’exemple flagrant, avec la série des commentaires qu’il fait suite aux tensions opposant « suprémacistes » à « anti-suprémacistes », puis de ses corrections, puis des corrections de ses corrections. Tout chef peut se tromper, mais dans certaines limites, puis corriger, mais il ne peut revenir encore et encore sur ses propos. Son message initial, celui qu’il voulait effacer, n’en est alors que plus fort. En l’espèce, les deux « extrêmes américains » – KKK et Nazis d’un côté et opposants qualifiés d’extrême gauche de l’autre (alt-left) – se vaudraient ! Et voilà des interrogations qui reviennent sur ses capacités d’analyse et sur sa porosité aux influences opposées de son entourage.

La casse est considérable, nationale, mondiale, et profonde. Otan, Russie, Chine, Arabie Saoudite, Turquie, Corée du Nord… sans oublier Europe, Alena, Mexique, Canada : Donald Trump a tout secoué. Mais pourquoi faire ? Il inquiète ses ennemis, ce qui est assez normal, mais surtout par son irrationalité, ce qui l’est moins. C’est aussi ce qui trouble ses amis et alliés. Ils se demandent dans quelle mesure ils le sont encore, et pour combien de temps – à payer par plus d’argent et de concessions. En même temps, Donald Trump accroît, aux Etats-Unis, les tensions religieuses, raciales et sociales, tout en mettant en cause le système d’informations qui « fait société », avec sa constante dénonciation des fake news. Si tout est faux, qui croire ?

Les marchés financiers américains commencent à prendre peur, eux qui avaient adoré le candidat Trump. Comme lui, ils voulaient plus de croissance, avec plus de profit et de simplifications. Comme lui, ils se méfient des taux trop bas de Janet Yellen qui peuvent pousser à des risques excessifs. Ils préfèrent les promesses d’impôts plus simples et plus faibles, avec moins de complications et de normes. Donald Trump, comme les marchés financiers, veut du crédit plus facile, des contrôles bancaires moins tatillons, un système de santé moins cher et, avec ces économies et cette croissance nouvelle, d’importants grands travaux. Pour lui, pour eux, la croissance ne doit pas se limiter à 2,5%, mais aller vers 3, 3,5 et pourquoi pas 4% ? Le Dow Jones achète et passe de 18.332 le 8 novembre 2016, jour de son élection à 19.827 le 20 janvier, jour de son investiture : +8,2%. Cette euphorie se poursuit contre vents et marées jusqu’au 7 août, avec un maximum de 22.118 points. Depuis, c’est le trouble, et la baisse.

Aux Etats-Unis, Donald Trump semble désormais vivre avec « ses généraux », avec plus de dépenses et moins de tweets, avec Wall Steet sous sa variante Goldman Sachs, avec une réécriture des messages protectionnistes de départ et moins de simplifications, et avec un Congrès qui a pris du poil de la bête, sous ses coups. On va discuter plus, dérèglementer moins, patrouiller davantage – pour aller où ?

Pendant ce temps, Xi Jinping attend d’être réélu en Chine – pas de problème, et surtout de faire venir avec lui ses obligés, à la direction du parti. Son pouvoir va se renforcer, sa stratégie de dominance des émergents par son plan OBOR (One Belt One Road), renommé BRI (Belt and Road Initiative), qui veut réunir par terre et par mer Asie, Europe et Afrique, s’amplifier.

L’hégémonie américaine, l’American dream, avec famille, maison et liberté, concerne un tiers de la population mondiale. La proposition chinoise vise tous les autres. Ce sera l’« aisance moyenne » (voulue par Deng Xiaoping), dans la stabilité politique, mais pas dans la liberté. Ceci mérite d’y réfléchir pour réagir, pas de casser.